Admiré par les uns, redouté par les autres, Paris-Roubaix ne laisse aucun cycliste insensible. Créée en 1896, cette course est l'une des plus anciennes courses cyclistes. Elle est, par exemple, née avant le Tour de France, le Tour d'Italie et le Tour d'Espagne !
Aujourd'hui devenue une course légendaire, « La Reine des Classiques » a vu le jour grâce à deux roubaisiens, tous deux industriels dans le textile, Théodore Vienne et Maurice Pérez. Également présidents du Sport Vélocipédique Roubaisien et du Cercle Vélocipédique Roubaisien, deux clubs cyclistes de Roubaix, les deux hommes décidèrent de construire un vélodrome dans leur ville. Inauguré en 1893, le vélodrome attendra trois ans avant d'accueillir cette course, devenue rapidement une classique.
En 1896, Vienne et Pérez proposèrent une course internationale, beaucoup plus courte que la seule épreuve classique existante en France à cette date, l'historique Bordeaux-Paris. Néanmoins, cette nouvelle course comportait une particularité. Contrairement à Bordeaux-Paris et Paris-Brest-Paris, les deux amis ont dans l'idée, non pas de désigner Paris comme ville d'arrivée, mais de désigner Paris comme ville de départ, avec une arrivée chez eux à Roubaix, dans leur vélodrome !
Maurice Pérez et Théodore Vienne
Cependant, pour parvenir à leurs fins, Vienne et Pérez ont besoin de soutien et quoi de mieux que le seul quotidien sportif de l'époque pour cela ? Ces derniers contacteront donc Paul Rousseau, Directeur du journal « Le Vélo » et décriront leur Paris-Roubaix comme une course dont le but est de préparer les coureurs à Bordeaux-Paris, course qui aura lieu quelques semaines plus tard.
« Cher M. Rousseau, Bordeaux-Paris approche et ce grand événement annuel qui a tant fait pour promouvoir le cyclisme nous a donné une idée. Que penseriez - vous d'une course d'entraînement qui a précédé Bordeaux-Paris par quatre semaines? La distance entre Paris et Roubaix est à peu près 280 km, donc il serait un jeu d'enfant pour les futurs participants de Bordeaux-Paris. L'arrivée aura lieu au vélodrome de Roubaix après plusieurs tours de piste […] Comme prix que nous avons déjà souscrit à un premier prix de 1.000 francs au nom du vélodrome de Roubaix et nous serons occupés d' établir une liste généreuse de prix qui sera à la satisfaction de tous. Mais pour le moment, nous pouvons compter sur le patronage de Le Vélo et sur votre soutien pour l' organisation du départ ? Si oui, annoncez de suite notre great event et ouvrez dans vos colonnes la liste des engagements ».
Le vélodrome de Roubaix après sa construction en 1896
Favorable à cette demande, le Directeur du journal missionnera Victor Breyer, rédacteur de la rubrique "cyclisme" pour reconnaître la course. Après avoir fait la route de Porte Maillot à Amiens, ce dernier décidera de terminer cette reconnaissance à vélo, le lendemain. Recouvert de boue après avoir tenté d'apprivoiser les pavés sous la pluie, Breyer est exténué au moment de poser pied à terre à Roubaix. Dans un état second après cette journée en enfer, le rédacteur jura d'envoyer un télégramme à son rédacteur en chef, Louis Minart, afin d'arrêter tout de suite ce « projet diabolique », dangereux pour les coureurs ! Finalement, et heureusement, Breyer n'enverra pas ce fameux télégramme ...
Le 19 avril 1896, le grand moment est enfin arrivé ! Le public est au rendez-vous pour le grand départ, Porte Maillot. Le quotidien "Le Journal de Roubaix" décrit l'atmosphère, au plus près des coureurs : « La salle du café devient un véritable paddock où l'on examine les concurrents, court-vêtus, avec curiosité... Ce sont de toutes parts des interpellations joyeuses. Parmi les derniers arrivés se trouve GARIN qui est acclamé... Enfin, paraît FISCHER, qui est l'objet de la curiosité de tous et s'y dérobe d'ailleurs fort modestement. Il donne l'impression de la santé sèche et présente l'aspect agréable d'un bel athlète... 5h20 : M. Victor BREYER, la liste de contrôle à la main, fait l'appel sur l'avenue où les coureurs sont rangés suivant leur ordre d'inscription ».
Comptant initialement une centaine d'inscrits, ils ne seront finalement que 48 au départ de cette première édition, à 5h30 du matin. 9 heures et 17 minutes plus tard, Joseph Fischer arrive, accompagné par les clairons de Hem, au vélodrome de Roubaix et devient le premier vainqueur de Paris-Roubaix ! Charles Meyer, second, arrive 26 minutes tard, Maurice Garin, futur premier vainqueur du Tour de France en 1903, arrive troisième, à 28 minutes du vainqueur ...
L'engouement populaire est au rendez-vous ! Paris-Roubaix vient de vivre sa première édition, une première qui en appellera 115 autres ...
Sportivement,
Paul de l'équipe CycloPro.